Portrait | Véronique Perrault, l’invisible éclaireuse 

Par Kamel Bencheikh - Le 10 juin 2025 - Montréal                                

Portrait | Véronique Perrault, l’invisible éclaireuse

Il est des artistes dont la lumière n’aveugle pas, mais révèle. Des femmes discrètes, traversant le monde sans fracas, laissant derrière elles une trace indélébile d’authenticité et de sens. Véronique Perrault appartient à cette lignée rare. Actrice, réalisatrice, passeuse d’âmes et de silences, elle avance dans l’ombre, en portant la lumière.

Comédienne habitée, elle ne joue pas, elle incarne. Chaque regard, chaque souffle, semble naître d’un lieu intérieur, à la frontière du visible et de l’indicible. À l’écran, elle ne se contente pas d’exister : elle transforme le cinéma en miroir de l’invisible. Plus qu’une interprète, elle est une présence. Une visitation.

Mais Véronique Perrault ne s’est jamais arrêtée aux chemins balisés. Refusant la facilité des trajectoires linéaires, elle a pris la tangente — celle de l’intuition, de l’exploration. Avec la caméra comme prolongement du cœur, elle a réalisé un premier film inclassable. Une œuvre tissée de silences et de vibrations, où l’homme et le cheval dialoguent sans mots. Plus qu’un documentaire, un poème incarné.

Puis, une autre porte s’est ouverte : celle de sa chaîne YouTube, véritable sanctuaire pour les voix écartées du tumulte. Elle y donne la parole à ceux qu’on n’écoute pas : éveillés, marginaux, artistes de l’ombre. À travers ses entretiens, c’est une écoute rare qu’elle offre — profonde, attentive, humaine. Vincent Hamain, Louis Fouché, Alexander Boldachev, Vincent Munier : chacun d’eux trouve en elle un espace pour exister autrement.

Véronique accueille aussi les enfants, non comme sujets, mais comme maîtres de leur propre vérité. Chloé, Sacha, Marion, Léon… Autant de prénoms qui résonnent comme des éclats de pureté. Elle ne les dirige pas, elle les accompagne. Elle capte l’essence, sans filtre, sans intrusion. Là où d’autres interrogent, elle attend. Elle recueille.

Aujourd’hui, elle porte un projet. Non pas un film comme un autre, mais une fresque intérieure. Une œuvre née de l’expérience, fécondée par la douleur et l’espérance. Un film sur l’amour — l’amour réel, sans artifices. Un amour vécu, blessé, lumineux. Elle le cherche encore, ce compagnon d’écriture capable de traduire l’indicible, de poser les mots justes sans froisser la musique intérieure.

Et parce qu’elle est avant tout une actrice d’âme, Véronique rêve aussi d’un rôle qui soit à la hauteur de ce qu’elle sait du monde. Un rôle sans masque, sans décor, cousu dans la chair de la vie. Elle ne veut pas séduire. Elle veut transmettre. Toucher. Éveiller.

Véronique Perrault ne se contente pas de créer. Elle est. Présence douce, mais puissante, elle avance comme une veilleuse dans nos nuits. Sa lumière n’éblouit pas — elle éclaire le dedans. Et son prochain film, lorsqu’il verra le jour, ne sera pas un simple objet d’art : il sera une offrande. Une main tendue. Une respiration pour ceux que le bruit du monde a blessés.

Car c’est là, peut-être, le plus grand don de Véronique Perrault : rappeler à chacun qu’il existe encore des gestes qui donnent, des voix qui chuchotent, des femmes qui regardent. Et aiment.

Ce jour-là, lorsque ce film naîtra — et il naîtra, inévitablement — ce ne sera pas un début. Ce sera l’aboutissement d’un engagement. Celui de créer avec vérité, et de vivre avec justesse. Et nous serons là. Non comme spectateurs. Mais comme témoins. Éveillés.